Les signes type placard ! 2/2 menu art

Que nous apprennent ces signes ?

La spécificité, la rareté et l'originalité des signes de type Placard nous assurent qu'il s'agit bien du même signe que l'on retrouve au Pech-Merle, à Cougnac, au Placard et à Cosquer. On apprend ainsi que les signes peuvent circuler sur de très grandes distances, à l'instar des techniques et des sculptures. Mais sont-ils les produits d'un artiste unique, ou d'une seule tribu, ou d'une même culture ? Son extension est-elle due à la migration de ses créateurs, ou alors fut-il transmis à une tribu par une autre ?


Que racontent ces signes ?

Au Pech-Merle, un signe du Placard surmonte un homme à tête d'oiseau transpercé de plusieurs traits. A Cougnac, la paroi de la grotte comprend onze signes du Placard à une extrémité et, plus loin, le dessin de deux hommes (l'un à tête d'oiseau) percés de traits. La grotte Cosquer contient elle aussi la gravure d'un homme blessé. A Lascaux, on l'a vu, il y a aussi une représentation d'un homme blessé à tête d'oiseau. Ce thème est assez rare pour ne pas être par hasard associé aux signes de type Placard.

Dans la grotte du Placard, les signes sont associés à des animaux, principalement des chevaux (cf. le cheval de Lascaux). Quelle histoire racontent ces associations de dessins ? Quels sont les thèmes, les concepts, les croyances contenus dans ces signes ? Que peut-on retracer des rituels observés au fond des grottes ? Au moins une certitude : la stalagmite située devant le second homme blessé de Cougnac a très souvent servi d'instrument à percussion et en a gardé la trace. Cougnac fut un lieu de culte très fréquenté. Le Pech-Merle par contre fut un sanctuaire qui ne reçut que de rares visiteurs.

On peut ajouter que les signes du Placard ne sont pas l'apanage exclusif de tels endroits sacrés, puisqu'au Placard, ils décorent le lieu d'habitat. Nous connaissons ce phénomène encore à notre époque, puisque les symboles religieux ne se limitent pas à la décoration des temples et des églises, mais s'observent également dans les demeures des croyants.


LE PLACARD


L'hypothèse sexuelle

Pour Leroi-Gourhan, les signes en accolade (comme il appelait les signes de type Placard) sont des signes bêta, qu'il a initialement fait correspondre au sexe féminin, dont des équivalents sont les dessins de blessures. Les traits, notamment ceux qui traversent les hommes blessés que nous avons observés, sont des signes alpha, masculins.
L'association des signes du Placard et des traits blessant les hommes renouvellerait ainsi la dyade alpha-bêta de Leroi-Gourhan. Parmi les signes qui ressemblent le plus aux "papillons" de Chauvet, j'ai noté que plusieurs sont des signes féminins : les pendentifs de Dolní Vestonice représentant des femmes et des seins, le signe en forme de seins de la grotte du Portel. A moins que ces pendentifs unissent les symboles des deux sexes. Züchner précise cependant que " la pensée paléolithique est bien plus complexe qu'une dyade masculin - féminin, et affirmer que les signes du Placard ne représentent que la féminité ne serait qu'une partie de la vérité ".
Les études actuelles sur l'art paléolithique sont plus prudentes et moins dogmatiques qu'au siècle dernier. Elles se contentent souvent d'être descriptives, mais avec précision et exhaustivité. Nous retiendrons donc surtout les associations du signe du Placard avec le thème de l'homme blessé (souvent à tête d'oiseau) et avec le dessin du cheval.


 

Les signes du Placard et les signes similaires.

Christian Züchner a mis en évidence la ressemblance entre plusieurs signes : les signes en forme de papillon ou d'oiseau de la grotte Chauvet (31000 BP), le signe en forme de seins ou de cœur du Portel, les deux bas-reliefs de Roc de Vézac (Dordogne) et les pendentifs gravettiens en ivoire de Dolní Vestonice (Moravie). En plus, au moins l'un des signes de Chauvet se rapproche des tracés rouges de La Pasiega (Nord de l'Espagne). Pour Züchner, les " papillons " de Chauvet sont peut-être les prédécesseurs réalistes des signes de type Placard.
Il est indéniable que la forme générale des "papillons" de Chauvet rappelle les signes de type Placard. Mais c'est également le cas des magnifiques pendentifs de Dolní Vestonice qui selon Vialou associent exceptionnellement les symboles des deux sexes. Je trouve que parmi les signes à rapprocher de ceux du Placard, il ne faut oublier ni les signes en accolade peints à Altamira et à El Castillo, ni l'étonnante "inscription" découverte dans la grotte de La Pasiega.
J'observe également que les deux cercles échancrés en bas-relief de Vézac sont semblables à trois disques échancrés présents au Pech-Merle, comme si tous ces lieux avaient plus d'un point commun.

Généralités

PECHE- MERLE

En conclusion (temporaire…)

Plusieurs groupes géographiquement éloignés, certainement des Solutréens, ont peint et gravé un signe mystérieux depuis la Charente jusqu'à la côte méditerranéenne. Ce signe a peut-être été reproduit pendant un à trente siècles. Il constitue peut-être une réminiscence de figures plus réalistes remontant à l'Aurignacien. Il démontre que des groupes différents vivant sur des territoires distants de plusieurs centaines de kilomètres ont entretenu des relations plus ou moins suivies. La signification de ce signe, peut-être féminin ou bisexué, parfois associé à des chevaux ou à des humains en danger, et dessiné aussi bien dans des habitats que dans des sanctuaires, restera sans doute à jamais inconnue.

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